Le Centre d’Actions pour le Développement (CAD) publie ce jour, son Rapport annuel sur la situation des droits humains en République du Congo, un document essentiel destiné à informer, à alerter, mais aussi à encourager des actions concrètes afin d’améliorer la situation. Ce rapport note une dégradation notable de la situation des droits civils et politiques dans le pays.
Avant d’aborder les constats, il est important de rappeler la manière dont ce rapport a été élaboré.
Le CAD s’appuie sur une méthodologie rigoureuse et éprouvée :
Chaque cas est analysé à partir d’une grille codifiée, permettant d’évaluer la nature, la gravité et le contexte juridique de chaque violation selon les normes nationales et internationales.
La rigueur de cette approche explique que toutes les allégations reçues n’aient pas pu être confirmées.
Ce rapport se veut un outil :
Il vise notamment à :
• présenter les tendances majeures en matière de respect, de protection et de réalisation des droits humains ;
• identifier les violations les plus préoccupantes et leurs impacts ;
• contribuer à la lutte contre l’impunité par des informations vérifiées ;
• appuyer l’action du CAD et de ses partenaires en faveur de l’État de droit ;
• fournir une base factuelle pour orienter les politiques publiques et les interventions internationales.
Le rapport couvre des enquêtes menées dans sept départements.
Cela ne signifie pas que l’ensemble de ces territoires a été couvert : seules certaines zones ont fait l’objet d’investigations, et même dans ces localités, il n’a pas été possible de documenter l’intégralité des situations, ce qui est inhérent à toute mission de terrain.
Sur le plan thématique, le rapport porte principalement sur les droits civils et politiques, regroupés en quatre catégories :
L’absence d’analyse d’autres thématiques ne doit en aucun cas être interprétée comme une amélioration de la situation.
Avec ses 202 pages, ce rapport n’a pas la prétention d’être exhaustif. Il représente plutôt la partie visible d’une réalité plus large et préoccupante.
L’année 2025 a été marquée par une dégradation notable des droits civils et politiques.
En 2024, le CAD avait documenté 1 814 violations des droits civils et politiques, soit 22 % des 8 216 violations toutes catégories confondues.
En 2025, ce chiffre a plus que doublé, atteignant 4 182 violations, soit une progression de 131 %.
Cette détérioration s’inscrit dans un contexte marqué par des opérations policières et militaires dont l’intensité a profondément modifié le paysage sécuritaire.
L’opération conduite par la Direction générale de la sécurité présidentielle (DGSP) constitue le principal facteur aggravant de l’année. Elle s’est illustrée par :
Cette dynamique a mis en évidence la fragilité institutionnelle du pays : ni le Parlement, ni la justice, ni la Commission nationale des droits de l’homme n’ont dénoncé les abus.
Une unité militaire s’est retrouvée investie d’un pouvoir létal, sans contrôle ni contre-pouvoirs.
Ce déséquilibre institutionnel, où une unité militaire concentre la force létale, l’impunité et le silence du sommet de l’État, constitue l’un des marqueurs les plus graves de la dérive autoritaire du pouvoir à Brazzaville.
Une situation inédite a également été documentée : la déportation et l’exploitation forcée d’environ 50 personnes autochtones du district d’Enyellé vers Imesse (RDC). Les autorités locales, informées, n’ont pris aucune mesure.
Ces faits ne sont pas des incidents isolés : ils témoignent de schémas récurrents et de zones d’impunité persistantes.
Chaque cas représente une vie brisée, une famille meurtrie, une communauté traumatisée.
Les violations documentées trouvent leurs causes dans :
• des mécanismes de contrôle insuffisants,
• des interventions sécuritaires abusives,
• un rétrécissement des libertés publiques,
• une prise en charge institutionnelle déficiente des victimes.
Ces facteurs alimentent la répétition et l’aggravation des abus.
Les recommandations formulées s’adressent :
• aux autorités nationales, pour renforcer l’État de droit et mettre fin à l’impunité ;
• aux institutions judiciaires, pour garantir des enquêtes indépendantes ;
• aux partenaires internationaux, pour soutenir les réformes et les formations ;
• à la société civile, pour poursuivre documentation, plaidoyer et accompagnement des victimes.
Elles proposent des solutions réalistes, pragmatiques et adaptées au contexte national.
Ce rapport n’est pas une conclusion : c’est un outil de travail, un levier et un appel à responsabilité collective.
Nous le présentons dans un esprit constructif, avec la conviction que l’État, la société civile, les communautés et les partenaires techniques et financiers ont chacun un rôle essentiel à jouer.
La protection des droits humains est l’affaire de tous. Elle est le fondement de la stabilité, du développement et de la paix véritable.
Nous invitons la presse et l’ensemble des partenaires à s’approprier ce rapport, à le relayer et à l’utiliser comme base pour renforcer le dialogue et impulser des changements.