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« Opération coup de poing » : la lutte contre la délinquance et la criminalité doit se faire dans le respect et la protection des droits humains

Une opération mixte gendarmerie-police baptisée « Opération Coup de poing », lancée le 14 mai dernier, procède à des raids massifs dans plusieurs quartiers de Brazzaville. (CAD) exprime sa profonde préoccupation suite aux violations des droits fondamentaux qui entourent cette opération de sécurité publique et appelle les autorités congolaises à prendre des mesures pour garantir le respect des droits de tous les citoyens. Télécharger la NOTE

Nous reconnaissons la nécessité de lutter efficacement contre la criminalité et le banditisme en République du Congo. Cependant, cette lutte ne doit pas se faire au détriment du droit. A ce stade, l’opération « Coup de poing » révèle de nombreuses violations des droits civils et politiques, notamment, le droit à la présomption d’innocence, le droit de ne pas être arrêté arbitrairement, le droit à la liberté de mouvement, le droit d’avoir les visites de ses proches, le droit d’avoir l’assistance d’un avocat dès le stade de l’enquête préliminaire, le droit au respect de la dignité humaine, le droit à la réparation en cas de détention arbitraire, etc. 

Dans son point de presse du 5 juin 2024, le Procureur de la République a indiqué :

  • l’arrestation de 580 personnes  pour diverses raisons ;
  • la libération de 247 après plusieurs jours de détention arbitraire ;
  • le maintien en détention de  315 personnes ;
  • le refoulement de 18 étrangers vers leurs pays d’origine ;
  • la poursuite des interrogatoires de suspects.

Seulement, il est à noter que ces interrogatoires se déroulent dans des conditions de stress et de violence psychologique, le tout sans l’assistance d’un avocat. 

Officiellement, 315 individus sont détenus dans un centre improvisé dont les structures d’accueil ne permettent pas d’offrir un minimum de dignité. Selon les témoignages en notre possession, ils sont détenus dans des conditions assimilables à des traitements cruels, inhumains et dégradants : ils ne mangent pas bien, ils n’ont pas accès à l’eau potable en temps opportun, ils n’ont pas la possibilité de se laver, de changer des vêtements et sous-vêtements, ils n’ont pas de lits ni de couvertures surtout en ce début de saison sèche, ils sont également privés des visites de membres de leurs familles ainsi que de l’assistance des ONG des droits humains. Des familles des victimes ont affirmé à notre organisation qu’elles procèdent à des transferts d’argent aux gendarmes et policiers pour, non seulement pallier au déficit de nourriture et d’eau potable mais aussi, pour chercher à obtenir la libération des leurs. Nous estimons que les besoins sécuritaires de la société, les libertés fondamentales et le respect de la dignité humaine ne sont pas du tout incompatibles.

  • Un avocat empêché de visiter ses clients

Les personnes arrêtées dans le cadre de cette opération sont constituées majoritairement par les couches les plus pauvres et les plus marginalisées de la ville de Brazzaville. Elles n’ont pas la possibilité d’engager les services d’un avocat alors que le droit de tout accusé de bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le stade des interrogatoires de police est un droit fondamental inaliénable. Le CAD a engagé le cabinet d’avocats BAGNE pour assister les détenus et s’assurer que le processus judiciaire se déroule équitablement et que les droits des personnes arrêtées sont garantis. Malheureusement, le 7 juin 2024, Maître Steve Hermann BAGNE, avocat et membre du Conseil du barreau n’a été autorisé ni à entrer en contact avec ses clients ni à accéder au site où sont cantonnés les centaines de personnes interpellées, au motif qu’il doit préalablement obtenir l’autorisation soit du colonel-major de la gendarmerie de Brazzaville soit du commandant territorial des forces de police de Brazzaville, deux responsables en charge de l’opération « coup de poing ». Cette entrave constitue une violation manifeste de la Constitution, de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

  • Nous vivons dans la peur des rafles

    Lors des descentes effectuées les 30 et 31 mai dernier sur le terrain, des jeunes ont indiqué aux membres de la plateforme pour les droits humains et la démocratie, qu’ils vivaient dorénavant dans la peur des rafles. « L’initiative de lutter contre le phénomène dit « bébés noirs » ne peut servir de prétexte à la force publique pour porter atteinte aux droits des citoyens » souligne Guerschom Gobouang, responsable Campagne et plaidoyer au Centre d’Actions pour le Développement (CAD).

« Sans remettre en cause la nécessité d’une opération de sécurité publique en raison de la montée de la criminalité dans la ville de Brazzaville, le CAD ne donnera pas caution à une opération critiquée par son manque de conformité aux normes nationales et internationales de protection des droits humains »  

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